La République démocratique du Congo et le Rwanda ont tenu le 31 juillet 2025 à Washington la toute première réunion du Comité conjoint de suivi de leur accord de paix, signé un mois plus tôt, le 27 juin, sous médiation américaine. Cette rencontre marque le démarrage effectif du processus de mise en œuvre d’un texte censé mettre fin à plusieurs décennies de tensions entre les deux pays voisins.
Autour de la table figuraient des représentants de la RDC, du Rwanda, des États-Unis, du Qatar, du Togo (facilitateur mandaté par l’Union africaine) ainsi que des membres de la Commission de l’Union africaine. Tous étaient présents pour accompagner le lancement opérationnel d’un accord qui se veut à la fois politique, sécuritaire, humanitaire et économique.
Au cœur du dispositif : la mise en œuvre du Plan de neutralisation des FDLR et de retrait des forces rwandaises (CONOPS), adopté en octobre 2024 à Luanda dans le cadre du processus UA-Angola. Ce plan servira de socle aux missions du Mécanisme conjoint de coordination de la sécurité (JSCM), dont la création a été préparée lors de cette première session. Le JSCM rassemblera des militaires, des services de renseignement et des diplomates congolais et rwandais, accompagnés d’observateurs du Qatar et des États-Unis. Il aura pour mission de superviser le respect des engagements sécuritaires et de publier des rapports mensuels détaillés.
Les membres du Comité conjoint de suivi ont également adopté les modalités de fonctionnement de leurs réunions futures et désigné les présidences du comité. L’objectif : veiller à l’application rigoureuse de l’accord, recevoir les éventuelles plaintes pour violations, recommander des solutions correctives et faciliter le règlement pacifique des différends.
L’accord, contraignant pour les deux parties, interdit toute forme d’hostilité directe ou indirecte, proscrit le soutien aux groupes armés, et impose le respect des frontières héritées de l’indépendance. Il prévoit aussi une articulation avec les négociations en cours à Doha entre Kinshasa et le M23, sous médiation du Qatar. Toute réintégration de combattants dans les forces régulières devra répondre à des conditions strictes de loyauté et d’absence d’implication dans des crimes de guerre.
Sur le plan humanitaire, les deux pays s’engagent à garantir le retour sécurisé des réfugiés, à faciliter l’accès humanitaire et à assurer la protection des civils, dans le respect des engagements de Kigali 2010 pris avec le HCR.
Le rôle de la MONUSCO est également réaffirmé. Le Rwanda et la RDC reconnaissent son importance pour la stabilité dans l’est congolais et promettent de respecter son mandat, sa liberté de mouvement et la sécurité de son personnel, conformément à la résolution 2765 du Conseil de sécurité des Nations unies.
Un chapitre économique ambitieux est aussi inclus dans l’accord. D’ici trois mois, un mécanisme d’intégration régionale doit être mis en place. Il comprendra notamment une gestion conjointe du lac Kivu, la traçabilité des chaînes d’approvisionnement minérales, des audits indépendants, et l’exclusion des circuits illicites. Ce volet s’appuiera sur les structures existantes comme la ZLECAf, la CIRGL et la CAE, tout en cherchant à attirer des investisseurs américains.
Le Comité de suivi poursuivra ses travaux sur la base du consensus entre toutes les parties. L’accord, déjà en vigueur, n’a pas de durée limitée, mais il peut être modifié d’un commun accord ou dénoncé avec un préavis de 60 jours.
Cette réunion inaugurale à Washington constitue une étape décisive dans un processus diplomatique inédit qui vise, cette fois, à rompre avec les cycles récurrents de violence dans la région des Grands Lacs.