Maroc : les peines alternatives à la prison seront appliquées dès le 22 août

Le Maroc franchit un cap majeur dans la réforme de son système pénal. À compter du 22 août 2025, la loi 43.22 introduisant les peines alternatives entrera officiellement en vigueur. Le gouvernement appelle toutes les structures concernées à s’engager pleinement pour garantir la mise en œuvre de cette réforme ambitieuse, pensée pour rendre la justice plus équitable et mieux ancrée dans la réalité sociale.

Dans une circulaire diffusée le 18 juillet, le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, exhorte les administrations, tant centrales que régionales, à accélérer les préparatifs liés à cette transition. Le texte met particulièrement l’accent sur la coordination avec la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR), chargée de piloter cette nouvelle approche.

La réforme, inscrite dans les grandes orientations royales pour une modernisation de la politique pénale, vise à réduire la surpopulation carcérale tout en favorisant la réinsertion. Elle repose sur quatre types de sanctions pouvant remplacer la détention pour les délits punis de moins de cinq ans, à condition qu’il n’y ait pas récidive : le travail d’intérêt général, la surveillance électronique, des restrictions ciblées, et une amende calculée à la journée.

Parmi ces options, le travail d’intérêt général (TIG) occupe une place centrale. Il consiste à effectuer des activités non rémunérées au profit d’organismes publics, d’associations ou d’institutions à but social. Le volume horaire peut atteindre 3 600 heures, équivalant à trois heures de service pour chaque jour de prison. Inspirée de pratiques déjà en vigueur dans des pays comme la France, cette mesure a démontré son efficacité en matière de réduction de la récidive.

Autre innovation majeure : la surveillance électronique. Grâce au port d’un bracelet connecté, le condamné est soumis à des règles strictes de présence dans une zone définie. Cette mesure offre un contrôle rigoureux sans incarcération, un modèle déjà adopté dans plusieurs pays européens. Au Maroc, cette alternative est d’autant plus attendue que le taux d’occupation carcérale dépassait les 130 % en 2023, avec plus de 100 000 détenus.

En complément, la loi introduit des limitations spécifiques telles que l’interdiction de fréquenter certains lieux, l’obligation de soins, l’assignation à résidence ou la convocation régulière devant les autorités. Ces restrictions visent à accompagner les condamnés tout en les maintenant dans un cadre structurant.

La dernière mesure permet de convertir la peine de prison en amende journalière, dont le montant est adapté à la gravité de l’infraction et à la situation économique du condamné. Elle s’inspire des modèles suisse et allemand, en introduisant une souplesse financière sans banaliser la sanction.

Sur le plan institutionnel, Hicham Malati, directeur des Affaires pénales, a confirmé que cette réforme s’inscrit dans un processus plus large de révision du Code pénal et du Code de procédure pénale. Il a souligné la nécessité d’une communication claire et d’une sensibilisation massive pour familiariser la population avec ces nouvelles dispositions.

Sur le plan académique, plusieurs juristes s’accordent à dire que le système actuel, issu du code de 1961, montre ses limites. Pour Bouthaina Karouri, professeure à l’université Mohammed-V, le recours systématique à l’incarcération n’a pas permis de répondre efficacement aux défis posés par la récidive et l’exclusion sociale. Elle appelle à une refonte globale, incluant la formation des professionnels de la justice.

La réussite de cette réforme dépendra donc d’un engagement réel de l’ensemble des institutions, mais aussi de la capacité à garantir une application équitable sur tout le territoire. Les exemples de la Norvège ou des Pays-Bas montrent que des systèmes plus humains et plus efficaces sont possibles.

Plusieurs textes réglementaires sont attendus dans les prochaines semaines. L’un définira les responsabilités de la DGAPR dans ce nouveau dispositif. Un autre portera sur la gestion de la surveillance électronique, en lien avec une entreprise spécialisée, actuellement en cours de sélection.

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