La proposition de loi agricole portée par les sénateurs Laurent Duplomb (Les Républicains) et Franck Menonville (UDI) a été définitivement adoptée ce mardi 8 juillet par l’Assemblée nationale. Ce texte, largement soutenu par le gouvernement, a recueilli 316 voix contre 223 dans une atmosphère tendue. S’il se veut une réponse aux protestations paysannes de l’hiver 2024, il n’en demeure pas moins au cœur d’une vive controverse.
Le point le plus décrié concerne la réintroduction encadrée d’un pesticide de la famille des néonicotinoïdes, l’acétamipride. Bien que présentée comme une mesure transitoire et soumise à conditions strictes, cette disposition suscite une vive opposition d’organisations de malades, d’écologistes et de syndicats agricoles minoritaires.
Réclamée de longue date par la FNSEA et le syndicat des Jeunes Agriculteurs, la loi Duplomb entend répondre aux difficultés rencontrées par les exploitants face aux aléas climatiques, aux ravageurs et à la compétitivité internationale. Elle s’inscrit dans un ensemble de mesures promises par l’exécutif à la suite du mouvement de colère agricole du début de l’année 2024.
Le gouvernement justifie le retour temporaire de l’acétamipride par la nécessité de lutter contre certaines menaces phytosanitaires, en l’absence d’alternatives efficaces. Une clause de révision annuelle serait également prévue pour limiter son usage dans le temps.
Cependant, plusieurs collectifs de patients atteints de cancers, des médecins, ainsi que des organisations écologistes, dénoncent un recul sanitaire et environnemental. Ils rappellent que les néonicotinoïdes ont été largement interdits dans l’Union européenne en raison de leurs effets délétères sur les abeilles, la biodiversité et potentiellement la santé humaine.
« C’est un retour en arrière dangereux. L’acétamipride appartient à une famille de substances dont la toxicité est largement documentée », affirme un représentant de l’association Générations Futures.
La Confédération paysanne, troisième syndicat agricole français, rejoint cette critique. Pour elle, la loi est le symptôme d’un modèle agricole dépassé qui privilégie des solutions chimiques à court terme au détriment d’un véritable virage agroécologique.
L’adoption de la loi Duplomb illustre la fracture persistante entre deux visions de l’agriculture : celle, productiviste, défendue par les syndicats majoritaires et soutenue par le gouvernement, et celle, plus durable, promue par une partie de la société civile et de la jeunesse agricole.
Alors que les défenseurs du texte y voient un outil pour « sauver des récoltes et préserver la souveraineté alimentaire », ses opposants dénoncent une menace pour la santé publique et un recul des engagements climatiques.
Malgré les appels à la prudence, la majorité présidentielle a maintenu son cap, préférant rassurer les filières agricoles fragilisées plutôt que céder aux alertes environnementales. Le débat, lui, est loin d’être clos.