Kenya : le PR Ruto hausse le ton face aux manifestations et menace les fauteurs de troubles

Le président kényan William Ruto a fermement averti, mardi ceux qui, selon lui, chercheraient à « renverser » le gouvernement, deux jours après des manifestations sanglantes qui ont fait 31 morts à travers le pays. Il a notamment menacé les auteurs de pillages de sanctions physiques directes, dans un discours musclé prononcé à Nairobi.

« Ceux qui veulent provoquer des troubles pour changer le pouvoir de manière anticonstitutionnelle se trompent de voie », a martelé M. Ruto, accusant certains manifestants de viser une déstabilisation préméditée en amont de l’élection présidentielle de 2027.

Faisant fi des critiques, le chef de l’État a appelé les forces de sécurité à tirer pour « casser les jambes » des fauteurs de troubles, avant de les traduire en justice. « Pas pour les tuer, mais pour qu’ils soient arrêtés, soignés et jugés », a-t-il précisé.

Les violences du 7 juillet, jour de commémoration du soulèvement pro-démocratie de 1990 baptisé Saba Saba, ont été marquées par une répression brutale. La police a quadrillé les axes menant à Nairobi, vidé les rues, et affronté des manifestants dans les périphéries.

Selon la Commission nationale des droits humains (KNCHR), au moins 31 personnes ont été tuées, 107 blessées, deux portées disparues et 532 arrêtées. Ce bilan a déclenché une vague d’indignation nationale et internationale. L’ONU s’est dite « profondément préoccupée » et a rappelé que l’usage de la force létale ne peut être justifié que pour protéger des vies.

Le climat politique s’est encore tendu mardi, avec l’appel de figures de l’opposition à un boycott généralisé des entreprises et services liés au gouvernement. L’ancien vice-président Rigathi Gachagua a dénoncé des « milices sponsorisées » par l’État, qu’il accuse d’avoir infiltré les manifestations pour justifier la répression.

Depuis son élection en 2022, William Ruto fait face à une contestation croissante, alimentée par une politique fiscale jugée antisociale. Le projet de loi de finances de 2024, contenant de nouvelles taxes, avait provoqué une mobilisation massive, au cours de laquelle le Parlement avait brièvement été envahi. Plus de 60 personnes avaient été tuées à cette époque, et de nombreux cas de disparitions forcées avaient été rapportés.

Fin juin, Nairobi avait déjà affirmé avoir « déjoué un coup d’État », qualifiant les manifestations d’« acte de terrorisme ». Ces déclarations s’inscrivent dans une stratégie de durcissement sécuritaire qui inquiète les observateurs. Le Kenya, jusque-là perçu comme un modèle de stabilité politique en Afrique de l’Est, voit son image ternie par ces dérives autoritaires répétées.

Les semaines à venir seront décisives pour la suite du bras de fer entre le pouvoir et la rue. Face à une population de plus en plus exaspérée par la vie chère et les atteintes aux droits, l’exécutif mise sur la force. Mais jusqu’à quand ?

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