Thailand : la Première ministre Paetongtarn Shinawatra suspendue après une fuite téléphonique controversée

La Cour constitutionnelle de Thaïlande a décidé, mardi 1er juillet, de suspendre la Première ministre Paetongtarn Shinawatra de ses fonctions, le temps qu’une enquête éthique soit menée à son encontre. Cette décision intervient après la diffusion d’un appel téléphonique controversé avec Hun Sen, ancien Premier ministre et actuel président du Sénat cambodgien. Les neuf juges ont accepté à l’unanimité la requête d’enquête déposée contre elle, et sept d’entre eux ont voté en faveur de sa suspension. Elle dispose de 15 jours pour présenter sa défense.

La dirigeante de 38 ans, fille de l’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra, est accusée d’avoir compromis l’éthique de sa fonction à travers ses échanges avec le Cambodge, dans un contexte tendu de conflit frontalier meurtrier survenu le 28 mai, au cours duquel un soldat cambodgien a été tué. Ses propos dans l’appel, jugés trop conciliants avec Hun Sen et critiques envers un commandant militaire thaïlandais, ont déclenché une vague de protestations dans le pays et des appels à sa démission, notamment lors d’un grand rassemblement à Bangkok samedi dernier.

À la suite de l’annonce de la Cour, Paetongtarn a déclaré qu’elle acceptait la procédure et qu’elle n’avait agi que dans l’intérêt de la paix. « Je voulais éviter l’escalade, éviter une guerre inutile », a-t-elle assuré. Elle a également présenté ses excuses aux citoyens heurtés par ses propos. Son départ temporaire laisse place à Suriya Jungrungruangkit, probable Premier ministre par intérim, même si cette nomination n’a pas encore été confirmée. La suspension de Paetongtarn survient alors qu’une refonte ministérielle a été entérinée dans la matinée par le roi Maha Vajiralongkorn. Ce remaniement a été provoqué par le retrait du parti Bhumjaithai de la coalition gouvernementale, conséquence directe de la crise.

Paetongtarn devient le troisième membre de la famille Shinawatra à être évincé du pouvoir. Son père, Thaksin, et sa tante Yingluck, ont tous deux été déposés par des coups d’État en 2006 et 2014. Cette nouvelle suspension ravive les tensions entre la mouvance progressiste issue des urnes et l’establishment royaliste appuyé par la justice et les militaires. Parallèlement, deux ministres de son gouvernement sont aussi visés par des enquêtes pour abus de pouvoir dans une affaire présumée de trucage du vote sénatorial. L’un d’eux, le ministre de la Justice Tawee Sodsong, a déjà été partiellement suspendu de ses fonctions.

Thaksin Shinawatra, revenu en Thaïlande en 2023 après des années d’exil, fait lui-même face à une accusation de lèse-majesté liée à des propos tenus en 2015 en Corée du Sud. Il est aussi sous le feu des critiques pour avoir évité la prison, bénéficiant d’une grâce royale pour raisons médicales sans avoir passé une seule nuit en détention. Des plaintes exigent aujourd’hui qu’il purge réellement sa peine.

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