Le ton était grave et sans détour. À Berlin, lors de la Conférence ministérielle des Nations unies sur le maintien de la paix, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a livré un sévère réquisitoire contre les missions onusiennes. Face à ses homologues, il a accusé l’ONU d’avoir failli au Mali, dénonçant des mandats inadaptés, un manque de concertation, une aide inefficace et une instrumentalisation politique des droits de l’homme.
« On ne peut pas envoyer une mission de paix là où il n’y a pas de paix à maintenir », a lancé le ministre, pointant l’inefficacité de la Minusma dans un contexte de guerre asymétrique. Selon lui, les soldats onusiens ont souvent été spectateurs de massacres, invoquant l’inadéquation de leur mandat pour justifier leur inaction. Une situation qui a nourri un profond ressentiment au sein des populations maliennes.
Abdoulaye Diop a aussi critiqué l’absence de coordination entre les missions et les autorités maliennes. Il a évoqué des rapports publiés sans consultation préalable, des décisions prises unilatéralement, et une coopération rendue difficile par ce qu’il qualifie de mépris diplomatique. Pour lui, « aucune mission ne peut réussir sans concertation avec l’État hôte ».
Le diplomate a ensuite dénoncé le déséquilibre dans la répartition des ressources : 1,3 milliard de dollars annuels pour la Minusma, mais peu de moyens réellement alloués au renforcement des capacités nationales. À ses yeux, cette logique a affaibli la souveraineté du Mali au lieu de la renforcer.
Enfin, Diop a accusé certaines missions de manipulation politique sous couvert de défense des droits humains. Il a dénoncé des rapports « biaisés » et « hostiles », produits selon lui par des acteurs extérieurs animés de visées géopolitiques. « Ce n’est pas acceptable que 60 ans après les indépendances, ce soient encore les anciennes puissances coloniales qui rédigent les résolutions sur nos pays », a-t-il martelé.
Pour rappel, le Mali a exigé en 2023 le retrait de la Minusma, marquant ainsi la fin d’une décennie d’opérations de maintien de la paix. Un départ qui, selon Bamako, s’imposait face à une mission jugée inefficace et déconnectée des réalités du terrain.
Abdoulaye Diop a tout de même affirmé que le maintien de la paix reste essentiel, mais à condition de réformer en profondeur les pratiques onusiennes : respecter la souveraineté des États, écouter leurs besoins réels, et éviter toute ingérence politique. Un appel clair pour une coopération refondée, plus juste et mieux ancrée dans les réalités africaines.