Jean-Luc Mélenchon dénonce une dérive politique grave après la tenue d’un Conseil de défense consacré aux « Frères musulmans » et à l’« islamisme » politique. Pour le fondateur de La France insoumise, ce rendez-vous sécuritaire, organisé à l’Élysée autour du président Emmanuel Macron, constitue un tournant dangereux dans la stigmatisation des musulmans. « Cette fois-ci, l’islamophobie franchit un seuil », a alerté Mélenchon dans un message publié sur le réseau X. Il y voit la validation officielle des discours de Bruno Retailleau et de Marine Le Pen, qu’il qualifie de « thèses délirantes ». Dans une critique frontale de la méthode gouvernementale, il évoque un précédent historique inquiétant : « Ce genre de méthodes a déjà été appliqué contre les protestants et les juifs. Cela conduit tout droit à un déchaînement d’inquisitions cruelles contre les personnes et désastreuses pour l’unité du pays. »
Le rapport à l’origine de cette réunion confidentielle alerte sur l’influence supposée des « Frères musulmans » dans plusieurs sphères de la société française. Emmanuel Macron a demandé des mesures concrètes à soumettre début juin. D’ici là, le contenu du rapport doit être rendu public. Mais le climat autour de ce document est déjà chargé.
Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, propose notamment la création d’un « parquet administratif » pour accélérer les dissolutions d’organisations soupçonnées de liens idéologiques avec les « Frères musulmans ». Une piste qui renforce les craintes d’un arsenal liberticide ciblant des structures jugées trop critiques ou simplement musulmanes.
Nicolas Cadène, ancien rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité, fustige un rapport mal sourcé et approximatif. Selon lui, le document compile des idées anciennes, truffées d’amalgames et de raccourcis dangereux. Il s’inquiète d’un texte livré dans un moment de tension nationale, peu après l’assassinat d’Aboubakar Cissé dans une mosquée du Gard.
Le jeune homme de 22 ans a été poignardé en pleine prière, le 25 avril dernier. Les autorités ont reconnu le caractère islamophobe de l’acte. Le meurtrier présumé, âgé de 21 ans, est poursuivi pour assassinat à caractère religieux et placé en détention provisoire. Dans ce contexte, Cadène plaide pour la retenue et accuse certains responsables et médias de nourrir un climat anxiogène autour de l’islam.
Malgré ces critiques, l’exécutif maintient le cap. L’Élysée évoque la « gravité » des faits décrits dans le rapport pour justifier une réaction rapide. Mais pour Mélenchon, le risque est ailleurs : dans la normalisation d’une islamophobie institutionnelle maquillée en lutte antiterroriste.