À la veille du coup d’envoi de la CAN 2025, la Confédération africaine de football a officialisé un tournant historique. Après les éditions 2027 et 2028, la Coupe d’Afrique des Nations ne se jouera plus tous les deux ans, mais tous les quatre ans. Une annonce qui a immédiatement provoqué une levée de boucliers dans une partie du football africain, attachée à une compétition considérée comme un symbole identitaire fort depuis près de sept décennies.
Pour de nombreux acteurs, cette réforme est vécue comme une rupture brutale. Ancien gardien emblématique du Cameroun, Joseph Antoine Bell dénonce une décision qui éloigne la CAN de son public. Il estime que priver l’Afrique de son grand rendez-vous biennal revient à affaiblir une fête populaire profondément ancrée dans les habitudes sportives du continent.
La contestation la plus virulente est venue du sélectionneur du Mali, Tom Saintfiet. Le technicien belge voit dans ce changement une concession faite aux puissances du football mondial. Selon lui, la CAN offrait une vitrine unique au football africain et participait à sa reconnaissance internationale. Passer à un rythme quadriennal, sans demande claire des fédérations africaines ni des joueurs, reviendrait à sacrifier une histoire construite sur près de 70 ans au profit d’intérêts financiers extérieurs, notamment ceux des clubs européens et des grandes instances internationales.
Cette décision ravive aussi la comparaison entre l’actuelle gouvernance de la CAF et celle d’Issa Hayatou, ancien président de l’instance panafricaine, connu pour avoir longtemps résisté aux pressions visant à aligner la CAN sur le calendrier européen. La proximité de Patrice Motsepe avec la FIFA alimente les soupçons d’un alignement stratégique, d’autant plus que la réforme du calendrier semble favoriser la Coupe du monde des clubs, devenue une priorité mondiale.
Toutefois, le débat ne fait pas l’unanimité. Certaines voix appellent à la nuance. Le sélectionneur du Maroc, Walid Regragui, reconnaît que le format biennal permettait aux équipes de se reconstruire rapidement, mais admet que la nouvelle formule pourrait apporter davantage de pression sportive et de prestige. Même son de cloche chez le capitaine algérien Riyad Mahrez, qui évoque une possible montée en intensité et en attractivité de la compétition.
Si l’attention reste focalisée sur les enjeux sportifs immédiats de la CAN 2025, la question de la périodicité de la compétition est désormais posée avec acuité. Entre défense d’un héritage historique et adaptation aux contraintes du football mondial, la réforme de la CAF ouvre un débat profond sur l’avenir du football africain et sa capacité à préserver son identité face aux équilibres de pouvoir internationaux.



