La tentative de coup d’État qui a secoué le Bénin le 7 décembre continue de produire des ondelettes diplomatiques dans la sous-région. Alors que la situation intérieure est désormais stabilisée à Cotonou, une nouvelle question domine les discussions : le Togo va-t-il coopérer pleinement avec le Bénin concernant le lieutenant-colonel Pascal Tigri, chef des mutins, désormais annoncé en territoire togolais ? Selon plusieurs sources proches du dossier, l’officier en fuite se trouverait dans le secteur de Lomé 2, où il aurait obtenu un refuge temporaire. Cette information, non confirmée officiellement par Lomé, intervient au moment où Cotonou prépare une notice rouge d’Interpol afin d’obtenir son extradition.
Une affaire qui met à l’épreuve la relation Togo-Bénin
Les relations entre les deux pays sont généralement décrites comme « correctes », sans être exemptes de divergences stratégiques. Les postures respectives adoptées face aux coups d’État sahéliens en témoignent : le Bénin privilégie une ligne de fermeté et de refus de légitimation des juntes ; le Togo, en revanche, entretient des liens plus fluides avec les régimes militaires de Niamey, Bamako ou Ouagadougou. L’arrivée de Tigri sur le sol togolais place donc Lomé dans une position délicate. Extradition, maintien sur place, ou transfert vers un pays tiers ? Chaque scénario aura des conséquences diplomatiques.
Cotonou attend des garanties claires
Pour le Bénin, l’enjeu est double : obtenir la extradition rapide du principal instigateur du putsch, afin qu’il réponde de ses actes, s’assurer qu’aucune manœuvre ne permettra à l’intéressé d’être discrètement expédié vers un autre pays, notamment vers le Burkina Faso, où des solidarités militaires pourraient trouver un écho. La crainte d’un transfert déguisé, justifié ensuite comme une « fuite » du fugitif, n’est pas anodine dans une région où ce type d’opacité a déjà été observé.
Un test pour la stabilité régionale
Au-delà de la relation bilatérale, l’affaire Tigri devient un test de crédibilité pour la coopération sécuritaire ouest-africaine. Les coups d’État successifs au Sahel ont fragilisé les mécanismes régionaux. Pour beaucoup d’observateurs, la manière dont le Togo gérera ce dossier dira beaucoup de sa volonté : de contribuer à la lutte contre la déstabilisation politique, de respecter les procédures internationales, de renforcer la confiance entre États voisins. Un choix ambigu pourrait au contraire nourrir des tensions inutiles au moment où la région a besoin de cohésion.
Lomé sous pression, Cotonou en attente
Pour l’instant, Lomé n’a laissé filtrer aucun commentaire officiel. Mais les attentes sont fortes. Du côté béninois comme du côté des partenaires régionaux, un message se détache : la stabilité politique ne peut s’accommoder de zones grises. Les prochains jours seront donc décisifs. Le Togo acceptera-t-il d’extrader Tigri ? Gardera-t-il le putschiste sur son sol le temps d’instruire la demande ? Ou prendra-t-il une orientation qui alimenterait la suspicion ?
Une certitude demeure, après avoir échoué à renverser l’ordre constitutionnel à Cotonou, le lieutenant-colonel Tigri devient, malgré lui, un test grandeur nature pour la diplomatie togolaise.



