Jeannette Jara, candidate communiste soutenue par la coalition de centre gauche au pouvoir, affrontera l’ultraconservateur José Antonio Kast au second tour de la présidentielle chilienne. Le premier tour, dominé par la peur croissante de la criminalité, a renforcé le candidat d’extrême droite. Selon les résultats portant sur plus de 99 % des bulletins, Jara obtient 26,85 % des voix contre 23,92 % pour Kast. Le second tour est prévu le 14 décembre.
Pour l’analyste Rodrigo Arellano, ces résultats sont une déception pour la gauche. Il estime que l’équipe de Jara espérait dépasser les 30 %. Il souligne également que l’ensemble des candidats de l’opposition dépassent largement la candidate gouvernementale. Les sondages anticipaient déjà une défaite de Jara au second tour face à un candidat de droite, en raison des reports de voix.
Le contexte politique ouvre la voie à un possible retour de la droite radicale au pouvoir, une première depuis la fin de la dictature d’Augusto Pinochet en 1990. Jeannette Jara appelle les électeurs à résister au climat de peur. Elle affirme que la menace sécuritaire ne doit pas pousser le pays vers des solutions extrêmes. José Antonio Kast, de son côté, promet de « reconstruire » le Chili, de vaincre la criminalité et le narcotrafic et de renforcer les frontières.
La droite est aussi représentée par le député libertarien Johannes Kaiser. Avec 13,94 % des voix, il annonce soutenir n’importe quel candidat de droite contre la gauche. Toutefois, il est devancé par Franco Parisi. L’économiste obtient 19,71 % et refuse pour l’instant de se prononcer sur un éventuel soutien. Parisi s’était déjà illustré en proposant de poser des mines à la frontière avec la Bolivie pour freiner l’immigration clandestine.
Evelyn Matthei, candidate de la droite traditionnelle, obtient 12,46 %. Cette dispersion des candidatures à droite n’affaiblit pas pour autant Kast, porté par un électorat sensible au discours sécuritaire. Le Chili reste l’un des pays les plus sûrs du continent, mais la criminalité augmente. Le taux d’homicides est passé de 2,5 à 6 pour 100 000 habitants en dix ans. Les autorités ont recensé 868 enlèvements en 2024, soit une hausse de 76 % par rapport à 2021.
L’inquiétude face à la violence domine désormais le débat public et relègue au second plan les aspirations de 2022 qui avaient porté Gabriel Boric au pouvoir, notamment la réforme constitutionnelle abandonnée depuis. Une partie de l’électorat réclame plus de fermeté. Certains votants affirment vouloir une politique migratoire plus stricte et un contrôle renforcé des frontières.
Jeannette Jara tente de durcir son discours en matière de sécurité pour répondre à ces préoccupations, mais sans convaincre une majorité. Elle rappelle qu’elle n’a « aucun complexe » sur ce sujet et défend une politique migratoire plus rigoureuse. Kast, qui se présente pour la troisième fois, vise directement les 337 000 étrangers en situation irrégulière, en majorité des Vénézuéliens. Il promet des expulsions massives, la construction d’un mur frontalier, plus d’armes pour la police et un déploiement militaire dans les zones jugées critiques.
Plus de 15,6 millions d’électeurs étaient appelés à voter pour départager huit candidats et renouveler la Chambre des députés ainsi que la moitié du Sénat. Le second tour s’annonce décisif pour un pays profondément divisé entre promesse de fermeté et défense des libertés publiques.



