Procès Lafarge : la défense met en avant une coopération utile aux renseignements français

 

La deuxième journée du procès de Lafarge SA, poursuivie pour financement du terrorisme en Syrie, a été dominée par les débats de procédure et de vives passes d’armes entre la défense et les parties civiles. L’avocat de Bruno Lafont, ancien PDG du groupe, Me Quentin de Margerie, a souligné que les liens entre Lafarge et les services de renseignement français relevaient d’« une relation cynique et opportuniste », mais qu’ils avaient « grandement bénéficié » aux autorités françaises. Il a demandé la levée du secret défense, arguant que les éléments actuellement accessibles, datant d’avant 2009 et d’après 2015, ne permettent pas d’apprécier la nature exacte de ces échanges.

Des documents rendus publics en 2021 par l’agence Anadolu avaient déjà révélé que Lafarge communiquait régulièrement avec les services français tout en négociant sur le terrain avec des groupes armés tels que Daech et Jabhat al-Nosra pour garantir la sécurité de son usine de Jalabiya, au nord de la Syrie.

Ces arguments ont provoqué de fortes réactions du côté des parties civiles. Me Grégoire Rialan, avocat de l’association Sherpa et de victimes syriennes, a estimé que la défense tentait de « détourner le débat » pour éviter de répondre des faits reprochés : « Ces incidents sont avant tout dilatoires et visent à gagner du temps », a-t-il déclaré à la sortie de l’audience. Sa collègue, Me Julie Février, a ajouté qu’il était « temps d’aborder enfin le fond du dossier ».

Lafarge SA, désormais intégrée au groupe Holcim, est accusée d’avoir versé plusieurs millions d’euros à des organisations terroristes entre 2012 et 2014 afin de poursuivre ses activités malgré le conflit syrien. Il s’agit du premier procès en France visant une entreprise pour financement du terrorisme.

En 2022, la société avait reconnu devant la justice américaine avoir financé des groupes armés et avait accepté de payer une amende de 778 millions de dollars. Les audiences reprendront mercredi avec l’examen du fond de l’affaire et l’audition des anciens dirigeants, tandis que la question du rôle de l’État français et de ses services de renseignement reste au cœur des débats.

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