Au Bénin, dans la soirée d’hier, vendredi 31 octobre 2025, à Cotonou, la députée Chantal Adjovi, élue de la 16ᵉ circonscription électorale, a officiellement annoncé sa démission du parti Les Démocrates (LD). L’annonce, faite avec quelques-uns de ses collègues, intervient dans un contexte de fortes tensions internes au sein de la formation politique dirigée par Boni Yayi. À la fin de la rencontre, l’élue s’est confiée à la presse, revenant en détail sur les raisons qui ont motivé sa décision. Elle évoque notamment des dysfonctionnements internes, des menaces de mort, des luttes de positionnement et un manque de cohésion régionale qui, selon elle, ont fragilisé l’unité du parti.
Déclaration intégrale de Chantal Adjovi 👇
Au début, le parti fonctionnait très bien. Mais ces derniers temps, des choses se passent à l’intérieur qui ne vont pas. Si tu te plains auprès du Président Boni Yayi, il te dit de laisser, mais la situation ne fait qu’empirer. On te menace de mort simplement à cause du positionnement sur les listes, où l’on te dit : « Toi, tu n’iras pas aux élections, ce sera moi. » Il y a des insultes déplacées, des tensions… Le parti est aujourd’hui gâché par une poignée d’environ sept personnes.
Ce qui me touche profondément, c’est que notre président ne trouve globalement rien à dire face à ces dérives. Nous avons déjà été recalés pour les présidentielles, et maintenant que nous n’y sommes pas allés, qu’en sera-t-il des législatives et des municipales ? Cela voudrait dire que nous n’y serons pas non plus. C’est de là qu’est venue ma décision : je ne veux pas être élue une seule fois par hasard. J’ai déjà fait trois mandats, et je souhaiterais compétir à nouveau. C’est pourquoi je me suis mise en retrait, pour observer ce qui se passera.
Le pouvoir en place ne nous a rien donné en contrepartie de ce geste. Nous n’avons pas décidé de quitter notre parti parce qu’on nous aurait corrompus ou promis quoi que ce soit, non, pas du tout. Nous sommes partis pour avoir l’opportunité de participer aux prochaines législatives. Nous ne trahissons pas le peuple, contrairement à ce que certains disent. Ceux qui sont hauts placés dans notre parti refusent de dire la vérité au peuple. Ils savent pertinemment que nous ne participerons à aucune des trois élections et préfèrent cacher cette réalité.
L’idéal serait d’informer le peuple au plus tôt, mais ils dissimulent tout. Moi, je ne peux pas rester dans cela. C’est pour cette raison que j’ai pris la décision de quitter, et je dis à mes soutiens, sympathisants et autres : nous n’irons à aucune des élections. Ils nous ont déjà trouvé des prétextes pour nous exclure de la présidentielle, ils sont donc capables d’en inventer d’autres pour nous écarter encore. Qu’on ne se trompe pas et qu’on dise la vérité au peuple ! Et si le peuple doit pleurer, qu’il pleure…
Je suis peinée de déclarer ma démission. J’ai pleuré, je suis tombée malade à cause de notre exclusion des présidentielles. Parce que lorsque viendront les élections législatives et qu’on nous recalera encore, je ne pourrai pas le supporter. Cela pourrait même me conduire à faire un AVC et je ne souhaite pas mourir pour une cause politique.
Notre démission, survenue maintenant, ne doit étonner personne. Non, elle n’est pas prématurée. Nous étions parmi les membres fondateurs, les premiers à concevoir ce parti ; il fallait donc que nous restions pour tenter de le bâtir et de le protéger. Mais hélas… les querelles, les divisions ! Le parti est désormais miné par des clivages régionaux entre Sudistes et Nordistes. Ce n’est plus un parti uni, mais divisé.
Je n’ai pas retiré mon parrainage, qui se trouve d’ailleurs entre les mains du président du parti. Nous n’avons pas fait alliance avec notre collègue Sodjinou, non. Ce qu’il a fait n’est pas bien, et cela nous a profondément blessés. Nous avons cherché à comprendre les raisons qui ont motivé sa décision, et c’est ce que nous avons fini par découvrir avant de démissionner.
Celui qui souffre depuis des années, qui s’est battu en première ligne, et lorsqu’arrive le moment de le choisir, on lui retire la place qu’il mérite… C’est dégueulasse. Pour tuer un coq, on lui donne d’abord de l’eau à boire. Et pire encore : on ne l’a même pas consolé ni fortifié. À la fin, on nous impose notre petit frère. C’est triste et incompréhensible.
Pour être honnête, le choix de Renaud Agbodjo ne m’a pas plu. N’oublions pas que pour aller aux élections législatives de 2023, c’est lui qui nous a aidés, qui s’est battu pour que nous y participions, et au final, il n’a rien obtenu.
Chantal Adjovi, Députée LD démissionnaire, 16ᵉ circonscription électorale.



