Dans un climat de crise énergétique et industrielle persistante, les autorités algériennes annoncent en grande pompe la création de deux nouvelles cimenteries à Djelfa et Relizane, ainsi que l’extension de celle d’Adrar. Présentées comme des projets « verts », ces initiatives, portées par le ministère de l’Industrie et la compagnie nationale Sonatrach, peinent pourtant à convaincre.
Aucun détail technique n’a été fourni sur les méthodes de production, les mécanismes de réduction des émissions ou l’adoption de normes internationales comme le ciment LC3 ou les technologies de captage du CO₂. À ce stade, il ne s’agit que de déclarations d’intention, sans feuille de route, ni cadre légal structurant.
Cette communication contraste avec la réalité du secteur : l’Algérie produit chaque année plus de 25 millions de tonnes de ciment pour une demande intérieure qui n’atteint pas 15 millions. Le surplus est destiné à l’exportation, mais les capacités logistiques restent faibles, et les équipements industriels, vétustes et polluants. Le verdissement promis repose essentiellement sur des procédés sommaires (substitution partielle du clinker, valorisation thermique ou utilisation de déchets) rarement audités et loin des standards internationaux.
Le pays ne s’est toujours pas doté d’une stratégie alignée sur les Accords de Paris ni d’un plan national de captage et de stockage du carbone. Le secteur, dominé par des entreprises publiques inefficaces et des opérateurs privés peu transparents, demeure figé. Contrairement au Maroc, qui mise sur une industrie verte intégrée aux chaînes de valeur européennes et tournée vers l’hydrogène propre, l’Algérie se cantonne à une posture rhétorique.
Dans les wilayas du Sud, frappées par les pénuries d’eau, les coupures d’électricité et une inflation galopante, ces annonces apparaissent déconnectées des réalités sociales. Le discours technocratique autour du « ciment vert » semble avant tout destiné à rassurer les partenaires étrangers, bien plus qu’à enclencher une véritable transition écologique.
Ce verdissement de façade illustre l’incapacité du pays à réformer son modèle industriel, englué dans l’opacité, la surcapacité et le déni climatique.