Le président sud-africain Cyril Ramaphosa a ordonné la création d’une commission d’enquête chargée de faire la lumière sur les retards persistants dans les poursuites liées aux crimes de l’apartheid. L’objectif : comprendre pourquoi justice n’a toujours pas été rendue à des dizaines de familles, près de trois décennies après la fin du régime ségrégationniste.
Cette commission, présidée par l’ancienne juge constitutionnelle Sisi Khampepe, épaulée par le juge retraité Frans Diale Kgomo et l’avocate Andrea Gabriel, devra établir si des interférences politiques ou administratives ont freiné les enquêtes lancées après les recommandations de la Commission vérité et réconciliation (CVR). Instituée dans les années 1990, la CVR avait préconisé des poursuites pénales contre les responsables de violations des droits humains n’ayant pas obtenu d’amnistie. Mais des années plus tard, la majorité de ces dossiers restent bloqués, provoquant colère et frustration chez les proches des victimes.
« Depuis des années, des soupçons d’ingérence planent sur ces affaires », a reconnu Cyril Ramaphosa. Il estime que cette situation a contribué à un « retard inacceptable » dans l’accès à la justice. Il espère que l’enquête apportera la vérité et des recommandations concrètes. La commission devra notamment déterminer si des membres de la police sud-africaine ou de l’Autorité nationale des poursuites (NPA) ont sciemment entravé les procédures judiciaires. Elle pourra aussi recommander des poursuites ou des réparations pour les familles.
L’enquête couvrira la période allant de 2003 à aujourd’hui et s’appuiera sur les plaintes déposées par les familles et leurs avocats. La commission dispose de six mois pour achever ses travaux, avant de soumettre un rapport final dans les 60 jours suivants.
Si la création de cette instance a été saluée, certaines familles réclament des mesures plus fortes, notamment des indemnisations et la reconnaissance de la responsabilité de l’État. Ramaphosa, tout en laissant la porte ouverte à des recours judiciaires indépendants, a appelé à la patience. De son côté, la NPA a commencé à rouvrir certains dossiers sensibles ces dernières années, allouant des ressources pour rattraper les retards accumulés.
Les conclusions de cette commission pourraient marquer un tournant dans le processus de réparation, en relançant les espoirs d’une justice longtemps différée pour les victimes du régime de l’apartheid.