Dans un pays où près de 90 % de la viande consommée provient de l’étranger, le ranch de Nyanga tente de repositionner la production locale. Avec ses 5 000 têtes de bétail et une production encore modeste, il séduit déjà restaurateurs et supermarchés de Libreville.
À Tchibanga, Matthieu Msellati, gestionnaire de site touristique, savoure une entrecôte issue du ranch voisin. “On sait d’où ça vient, c’est rassurant”, confie-t-il, alors que la campagne “Consogab” gagne en popularité sur les réseaux sociaux pour inciter à consommer gabonais.
Le gouvernement de Brice Oligui Nguema, soucieux de renforcer l’autosuffisance alimentaire, a multiplié les prêts à taux réduit pour les petites entreprises agricoles. Mais la réalité reste marquée par une forte dépendance : chaque Gabonais consomme en moyenne 40,8 kilos de viande par an, dont moins de 10 % produite localement, selon la FAO.
Seule grande exploitation bovine du pays, la Grande Mayumba Agrobusiness Company (GMAC) mise sur la race Ndama, résistante aux maladies mais peu productive : environ 140 kilos de viande par bête, contre plus de 200 pour les zébus. Malgré cela, son cheptel croît de 10 % par an et sa viande, autrefois limitée aux restaurants de la région, alimente désormais Libreville.
Toutes les deux semaines, 300 kilos de carcasses quittent le ranch pour la capitale, après un trajet de 700 kilomètres sur routes accidentées. “Si la viande n’arrive pas, les clients réclament aussitôt”, rapporte le boucher Youssouf Ori, installé aux Charbonnages.
Dans les supermarchés, un panneau “100 % gabonais” signale la viande du ranch. À prix égal avec la viande camerounaise (18 000 FCFA le kilo d’entrecôte), elle gagne du terrain. “La saveur est préservée, les clients adorent”, confirme une restauratrice de Libreville.
Le directeur du ranch, Gui-Lov Dibanganga, se dit fier de contribuer à l’objectif d’autosuffisance alimentaire. Mais il reste réaliste : “Pour nourrir toute la population, il faudrait cinq ou six entreprises comme la nôtre. Ce serait l’idéal.”