Indonésie : le pays le plus touché au monde par les intoxications au méthanol

 

L’Indonésie arrive en tête du classement mondial des cas d’intoxication au méthanol, une situation préoccupante qui relance les appels à un renforcement des dispositifs de prévention et de réponse d’urgence face aux risques liés à cette substance hautement toxique.

Au cours des vingt dernières années, l’Indonésie et douze autres pays de la région du Pacifique occidental ont signalé de multiples épisodes d’intoxication collective au méthanol. D’après les données disponibles, cette zone, qui regroupe 38 pays et territoires d’Asie-Pacifique, a enregistré 352 incidents depuis 2015. Plus de 5 100 personnes ont été affectées, avec un bilan humain de 1 571 décès, soit un taux de mortalité de 30,4 %.

L’Indonésie se distingue nettement des autres pays. Plus de 300 incidents y ont été recensés, touchant 2 185 personnes. Le taux de mortalité peut y atteindre 50,4 %, un niveau jugé exceptionnellement élevé par les spécialistes. Le Cambodge occupe la deuxième place, avec plus de 1 300 personnes intoxiquées, mais un taux de mortalité bien inférieur, estimé à environ 14,2 %.

Pour Seungyun Kim, expert en évaluation des risques au sein du Programme de gestion des urgences sanitaires de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour le Pacifique occidental, l’Indonésie est non seulement la plus touchée dans sa région, mais aussi à l’échelle mondiale. Selon lui, plusieurs facteurs sociaux et économiques expliquent cette situation.

Pays à majorité musulmane, l’Indonésie applique une réglementation stricte sur la consommation d’alcool. Les boissons alcoolisées autorisées sont lourdement taxées, ce qui pousse une partie de la population à se tourner vers des alcools artisanaux ou de contrebande, souvent vendus à bas prix sur le marché noir. Ces produits peuvent contenir du méthanol, utilisé comme substitut dangereux à l’éthanol.

Les experts de l’OMS alertent sur la gravité de ces intoxications, qui évoluent rapidement et exercent une forte pression sur les systèmes de santé. Le diagnostic précoce reste difficile et l’accès aux antidotes demeure limité dans de nombreuses zones.

Le danger du méthanol tient aussi à son mode d’action. La substance ne provoque pas immédiatement de symptômes visibles. Les formes graves apparaissent après sa transformation dans l’organisme en acide formique, entraînant des complications sévères telles que la cécité, des défaillances multiviscérales et, dans de nombreux cas, le décès.

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